Ghislaine, blanchisseuse à Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales)
Dans cette ville balnéaire baignée d’odeur de pin maritime et de douceur méditerranéenne, Ghislaine a créé en 2015 sa laverie, Costa Blanca, qui tourne à plein régime entre demandes des vacanciers, des hôtels et des campings. Celle qui a été secrétaire comptable pour France Boissons et courtière en rachat de crédit s’est reconvertie à 50 ans dans cette affaire qu’elle gère seule, avec un indéfectible enthousiasme.
Quel a été votre moteur pour lancer cette laverie ?
Clairement la passion pour le linge et les placards bien rangés ! Et puis une certaine lassitude dans mon précédent travail. Je connaissais bien Argelès, la laverie était en vente, j’ai donc sauté sur l’occasion.
Comment avez-vous vécues les premières années de votre entreprise ?
Super bien, car j’étais portée par mon projet. Et pourtant mon profil n’est pas le plus évident : femme seule avec un enfant à charge, devant m’endetter pour acheter le local… Tout n’a pas été simple et je me suis vu refuser un emprunt bancaire. Mais il ne faut pas se décourager, et aller voir d’autres banques. Dans mon cas cela a marché avec l’appui d’un bilan provisionnel d’activité réalisé par un expert-comptable. Et puis je me suis lancée rapidement, avec une clientèle présente.
« Être sa propre patronne, c’est agréable, mais cela demande de la rigueur et un bon sens de l’organisation. »
Quels conseils donneriez-vous à tous ceux qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise ?
Assurez-vous d’être passionné par votre activité et plein de volonté. Visualisez bien votre mode de vie à venir. Prenez votre mal en patience sur la partie administration et finance car c’est un passage obligé, et prenez les problèmes les uns après les autres, sans paniquer. Ne vous mettez pas trop la pression ! Échouer n’est pas un problème, votre expérience sera toujours précieuse, qu’importe ce qu’en dit votre entourage, car entreprendre peut intimider. Personnellement je me suis toujours dit que je pourrais retourner vers une autre activité, retrouver du boulot ailleurs en cas d’échec. Et regardez-moi après huit ans, toujours là, fidèle au poste !
Quelle est la valeur cardinale pour réussir sa création d’entreprise ?
La passion, c’est pour moi, la valeur principale car elle emporte tout le reste, en particulier dans les moments délicats. Vous vous dites que vous vous battez pour cette vie-là, car cela vous plait. Personnellement, ce que j’aime, c’est bien sûr rendre un linge de maison pimpant, mais aussi le contact avec les clients avec lesquels j’aime discuter. Être sa propre patronne, c’est agréable, mais cela demande de la rigueur et un bon sens de l’organisation. Mais votre cœur de métier, c’est votre carburant quotidien.
« Être entrepreneur, ce n’est pas seulement être artisan, commerçant… cela nécessite de comprendre un minimum la gestion. »
Quelles formations ont été utiles dans votre parcours ?
J’ai fait des stages obligatoires sur la création d’entreprise à la Chambre des Métiers de Perpignan. Ça aide notamment sur la partie gestion de l’activité, par exemple pour ne pas confondre le chiffre d’affaires avec les bénéfices. Être entrepreneur, ce n’est pas seulement être artisan, commerçant… cela nécessite de comprendre un minimum la gestion, même si vous êtes accompagné d’un comptable. Quant au métier de blanchisseuse, je l’ai appris toute seule, en autodidacte. J’ai beaucoup appris en faisant, portée par la passion de mon métier.
Anthony, coiffeur à Paris
Le salon Monsieur Anthony, c’est un écrin de bien-être dans l’agitation parisienne où l’instant dépasse la coupe ou la couleur. Aujourd’hui à la tête d’une équipe de cinq coiffeurs, Anthony évoque pour nous les défis des débuts, ce qui le pousse à avancer et glisse quelques conseils avisés.
Vous avez lancé votre salon en octobre 2019, un moment compliqué pour un entrepreneur…
Clairement ! J’ai ouvert Monsieur Anthony dans le 11e arrondissement, à Paris, entre la crise des "gilets jaunes", une grève massive des transports publics et le début du Covid, ce qui m’a stoppé dans mon élan pendant des mois. La clientèle d’un coiffeur doit pouvoir venir au salon sans difficulté, et là c’était vraiment compliqué puisque mon salon était situé près d’axes bloqués en raison des diverses manifestations. Mais là n’étaient pas les seuls obstacles… En effet, je suis allé voir cinq banques, qui ont toutes refusé de financer mon prêt pour l’achat du salon et les investissements de matériel. J’ai donc fait appel à un courtier, qui m’a proposé deux banques, dont l’une a accepté mon dossier selon des conditions raisonnables. Et elle ne le regrette pas, parce que quatre ans après mon premier client, j’ai aujourd’hui deux salons !
« Si votre projet rencontre une clientèle, qu’il est mené sérieusement et avec joie et passion, alors vous réussirez ! »
Quels conseils donneriez-vous à nos lecteurs qui envisagent de se lancer ?
Croyez en vous et en votre projet. Ne lâchez rien, et travaillez dur pour passer ces premières étapes. C’est tellement important comme état d’esprit, aussi fort que votre passion et vos compétences. Si vous vous lancez seul comme moi, vous ne pouvez compter que sur vous-même, car votre entourage pro et perso peut vous inciter à freiner devant les obstacles. C’est pour vous protéger, mais au final vous seul portez la conviction de la réussite de votre projet. Surtout, n’ayez pas peur d’échouer. Tout ce que vous allez faire ne sera pas perdu, et si votre projet rencontre une clientèle, qu’il est mené sérieusement et avec joie et passion, alors vous réussirez !
Aviez-vous anticipé toutes les facettes de votre entreprise ?
Non. Avant Monsieur Anthony, j’ai exercé comme coiffeur coloriste à Bordeaux et à Paris pendant huit ans comme salarié. Dans mon propre salon, j’ai commencé seul. Je n’ai pas songé à comment gérer mes cinq salariés actuels. J’ai abordé un sujet après l’autre, avec trois constantes : l’excellence d’exécution, un relationnel chaleureux avec ma clientèle, et une grosse force de travail. Chaque marche est importante, ton entreprise devient ce que tu te sens capable de donner pour elle.
Vous avez bénéficié de l’aide d’un dispositif de France Travail ?
Tout à fait ! J’ai quitté mon employeur avec une rupture conventionnelle. Cela m’a ouvert à deux ans d’indemnisation, à hauteur de 75 % de mon précédent salaire. Ce qui a été hyper précieux pour me constituer une trésorerie et donner du souffle financier à mon entreprise. J’ai pu aussi bénéficier d’une exonération dégressive des charges sociales les trois premières années. Tout cela m’a donné de l’air pour ouvrir Monsieur Anthony, surtout dans le contexte chahuté de son lancement.