Devenir journaliste

L’information en continu, la montée en puissance des réseaux sociaux et le télétravail transforment une profession qui attire toujours autant les jeunes.Pour assurer sa longévité professionnelle, l’apprenti-journaliste doit désormais savoir tout faire : un article de presse écrite, une dépêche web, une vidéo, un podcast et même dominer le graphisme.

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Depuis le 22 mai 1936, jour de la délivrance de la toute première carte de presse en France, rien n’a changé au fond. Le travail du journaliste est de recueillir l’information, de la traiter et de la diffuser sur un support écrit, parlé ou télévisé, selon les règles déontologiques et la ré-glementation en vigueur.

Pour prétendre au titre de journaliste professionnel, il faut, selon la loi, justifier d’une occupa-tion principale, régulière et rémunérée dans un ou plusieurs médias. En 2022, la Commission de la carte d’identité des journalistes professionnels (CCIJP) a délivré 34 043 cartes à des journalistes en activité, dont 1 950 premières demandes.

Une multitude de métiers

Sous la dénomination « Journaliste » peut se cacher près de cinquante fonctions qui recou-vrent des pratiques professionnelles bien distinctes. De reporter qui commente l’actualité en direct à la radio ou à la télévision au secrétaire de rédaction qui met en page les articles d’un quotidien, du critique d’art au webmaster éditorialiste, ou encore du localier (journaliste en charge des informations locales) au présentateur télé … Tous font partie de la grande famille de l’information en exerçant des métiers très différents. Il existe cependant un savoir-être com-mun à tous ces postes : savoir travailler en équipe, faire de preuve de rigueur, de précision et surtout de curiosité.

Ultra polyvalence et nouveaux formats

Avec la concentration des entreprises de presse, la montée en puissance des réseaux sociaux et le télétravail, les compétences d’un jeune journaliste ont du s’étoffer. « Aujourd’hui, explique Stéphanie Lebrun, grand reporter et directrice du Centre de Formation des Journalistes (CFJ Paris), on ne fait plus forcément carrière comme autrefois dans l’écrit, la radio ou la télévision. Il faut maintenant avoir plusieurs cordes à son arc et pouvoir passer d’un média à un autre. Il faut être polyvalent ».

Cela sous-entend être aussi à l’aise dans un journal de presse écrite que dans une agence web, savoir tourner des images, du son, prendre des photos et faire aussi du montage. Pour la directrice du CFJ, cette ultra polyvalence ne doit pas être perçue comme une nouvelle contrainte mais « comme une réalité à laquelle les jeunes arrivant sur le marché sont forcément confrontés ».

Cette demande de polyvalence survient au moment où les nouvelles générations se tournent vers d’autres formats. « Il y a une jeunesse qui a une culture différente, qui a envie de s’épanouir dans sa vie personnelle mais aussi dans son travail avec un langage différent », analyse Stéphanie Lebrun. « c’est pour cette raison que nous avons créé de nouvelles filières où l’on apprend à écrire sur les réseaux sociaux, à maitriser le graphisme ou encore à réaliser des podcasts et des documentaires ».

Curieux avec une bonne plume

Avant l’arrivée des téléphones portables et d’Internet, la formation des journalistes débutants était assurée en partie par les chefs de service et les anciens. « Aujourd’hui, le rythme des rédactions est trop rapide », affirme Elhame Medjahed, la directrice pédagogique de l’ESJ Paris et il ne suffit plus comme autrefois d’être curieux, malin, réactif et d’avoir une bonne plume pour prétendre à un poste de reporter sans avoir le diplôme. Une formation est fortement recommandée avant d’aller proposer ses services à une rédaction. Celles-ci sont nombreuses sur tout le territoire.
 

On y apprend à écrire, à parler à la radio, à présenter un journal télé, mais aussi à repérer fake news et manipulations et surtout à ne jamais déroger aux règles de déontologie qui ré-gissent la profession.

800 candidats dont 70 retenus

Sur l’ensemble des centres de formation (83 recensés par Wikipédia !), seuls 14 sont reconnus par la profession. Elles sont réunies au sein de la CEJ, la Conférence des Ecoles du Journalisme, et présentent de très bons taux d’insertion. « Au CFJ, 95% des diplômés exercent la profession de journaliste aux mois après la sortie de l’école », précise sa directrice. Contrairement à l’ESJ Paris qui accepte les bacheliers, le CFJ accueille des étudiants d’un niveau BAC +3 mais sans limite d’âge. Située à Paris avec une antenne à Lyon, l’école reçoit chaque année 800 candidats, mais n’en retient que 70 pour une formation de deux ans. Au CFJ Paris, le principe éducatif n’a pas changé depuis la création de l’école en 1946. Ce sera pour les étudiants de la 78ème promotion comme pour la première, « une immersion comme dans une vraie rédaction » orchestrée par des anciens élèves en poste dans de grands médias. On y apprend à écrire, à parler à la radio, à présenter un journal télé, mais aussi à repérer fake news et manipulations et surtout à ne jamais déroger aux règles de déontologie qui régissent la profession. « Quand on travaille dans l’urgence, il faut savoir trouver les bonnes sources, les recouper et parfois même les protéger, dit Stéphanie Lebrun. Cela s’apprend ».

Explosion des contrats d’alternance

La fiche ONISEP qui détaille les nombreux métiers du journalisme est parfaitement claire sur les difficultés à s’insérer dans cette profession. « Pas de débouchés », « la précarité est la règle » peut-on lire dans les première lignes de la présentation. Les écoles de journalisme ne garantissent pas un emploi avec le diplôme mais elles font tout pour connecter l’étudiant au réseau des anciens afin de faciliter leurs recherches d’un poste ou de piges. Les stages de fin d’année dans une entreprise de presse portent évidemment l’espoir d’y rester. En 2011, les contrats de formation en alternance ne représentaient que 128 demandeurs de la carte de presse. En 2021, ils étaient trois fois plus nombreux. Ce type d’apprentissage est aujourd’hui une vraie solution pour mettre un pied dans une rédaction.

Un métier qui fait toujours rêver

En dépit d’un horizon bouché côté emploi, le métier de journaliste fait toujours rêver. « Ce qui attire les jeunes, c’est d’abord la télévision et le sport, dit Elhame Medjahed, qui organise à l’ESJ Paris des journées portes ouvertes à celles et ceux qui envisagent de se lancer dans l’aventure. On y croise des futurs bacheliers qui viennent avec leurs parents avec l’espoir d’être un jour commentateur sportif ou grand reporter de guerre. Les risques professionnels bien expliqués par MétierScope comme l’exposition à des zones toxiques, des horaires compliqués en fin de semaine ou les jours fériés ne découragent pas les nombreux candidats. Véritable antidote à l’ennui et à la banalité, le métier de journaliste s’exerce avant tout par passion.