Pas de seniors dans vos équipes : et si c’était une erreur ?

Vous aimeriez recruter des seniors, mais vous hésitez peut-être à cause de préjugés qui, eux, sont bel et bien d’un autre temps. Zoom sur le Centre de formation de Bourgogne Franche-Comté, qui a embauché cinq profils aux parcours bien remplis. Le bilan : un succès inspirant.

"Les seniors se heurtent à de nombreuses idées préconçues"

D’aucuns les imaginent plus souvent fatigués ou peu au fait de la technologie : les seniors se heurtent à de nombreuses idées préconçues, qui sont autant d’obstacles lors de leur recherche d’emploi. Au Centre de formation de Bourgogne Franche-Comté (CFB) implanté à Besançon, le choix d’un candidat ne s’opère jamais sur l’âge, et toujours sur les compétences ou la volonté de se former pour acquérir les connaissances attendues. Pour Muriel Khalfaoui, adjointe à la direction du CFB, c’est donc tout naturellement, que Franck Sudeix, le directeur, a intégré « deux retraités ayant démontré leur envie de s’engager ».

Pierre, Enzo, Fatima, Fabienne et Dominique : 5 histoires de vie

Ainsi, Pierre est devenu formateur en acquisition des prérequis généraux (français, maths, informatique).
Quant à Enzo, il enseigne les sujets de sciences et d’informatique. Il prépare également les stagiaires au passage du code de la route et à l’utilisation d’un simulateur de conduite. Cet homme de 66 ans, qui a commencé à travailler en Sicile à l’âge de 15 ans puis s’est formé tout au long de sa vie en décrochant un BTS, une licence et un Bac+5, a été notamment formateur durant vingt ans à l’Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa). Retraité à 60 ans, il a effectué des travaux dans sa maison avant de se retrouver désœuvré et désemparé : « L’an dernier, je me suis demandé quel sens je donnais à ma vie en restant sans rien faire. Je me suis lancé dans une recherche d’emploi et j’ai été accueilli par le CFB qui m’a donné la chance de repartir à 66 ans. Je débute une nouvelle vie. » Avec son collègue Pierre, ils transmettent leur expérience de manière ludique, ce qui est très apprécié par les stagiaires.
« Ce public, assez fragile, a besoin de reprendre confiance et apprécie le côté un peu "maternant’’ lié à la maturité de ces formateurs », souligne Muriel Khalfaoui. Les stagiaires, dont une partie viennent de l’étranger, s’identifient par ailleurs à Enzo, arrivé en France à 19 ans sans parler français et qui a bâti une carrière exemplaire : « Ma carrière est un symbole d’une réussite accessible par le travail. »


« Ces seniors sont dotés de solides connaissances et se distinguent par la transversalité de leurs compétences, leur volontarisme, leur expérience. »

Le CFB a fait appel à une structure d’insertion par l’activité économique (IAE) pour trouver un agent d’entretien de ses locaux. Fatima a bénéficié par la suite d’un temps partiel en CDD. « Le principe, ajoute Muriel Khalfaoui, c’était de la faire évoluer avec un contrat Parcours emploi compétences (PEC), avec une ambition de pérennisation. » Fatima devrait bientôt obtenir un CDD en milieu ordinaire avec une possible transition vers un CDI.
Autre histoire : celle de Fabienne, une cadre de 59 ans dans le secteur de l’intérim. Après un accident de la vie, elle perd son emploi. Déterminée à revenir sur le marché du travail, elle multiplie les candidatures, mais se voit opposer de nombreux refus, au point de perdre toute confiance en elle. Après l’avoir rencontrée, Franck Sudeix lui propose, en accord avec son référent France Travail, un poste à temps partiel dans les relations administratives, avec un contrat PEC. Puis, le CFB ayant décidé de renforcer son développement interne, Fabienne se voit confier une mission dans les relations entreprises, au cœur de son domaine d’expertise.
De son côté, Dominique est revenue en France après une vingtaine d’années au Sénégal. À son arrivée, elle se sentait décalée, ne maîtrisant plus les codes du marché du travail. Elle a donc bénéficié d’un dispositif amont de la qualification (DAQ), qui lui a permis de retrouver un socle solide. Depuis, elle est devenue formatrice pour des bénéficiaires du DAQ au sein du CFB, et leur enseigne le français, l’histoire et des matières générales. En tant qu’ancienne stagiaire sur ce dispositif, elle est bien placée pour comprendre son public et créer avec lui un relationnel d’empathie et de confiance.

Un dynamisme communicatif

Pour Muriel Khalfaoui, ces cinq recrues sont autant d’exemples de réussite : « Elles expriment toutes une forte envie de travailler. Ces seniors sont dotés de solides connaissances et se distinguent par la transversalité de leurs compétences, leur volontarisme et leur expérience mise au service des stagiaires ou de leurs collègues. Leur dynamisme est communicatif, de même que leur souhait de rester actifs. » De son côté, Enzo confirme que les retraités qui viennent travailler sont volontaires et motivés : « Et en plus, nous sommes polyvalents. Je peux intervenir sur une matière transversale au pied levé, pour remplacer un collègue absent. » Pour lui, ce travail est un véritable bonheur : « Je revis chaque matin en me levant, je n’ai jamais été si heureux de toute ma vie. »
Un dynamisme et un enthousiasme communicatif pour l’ensemble du personnel, ce que confirme Muriel Khalfaoui : « Les seniors se sentent parfois fragilisés alors qu’ils ont toute leur place et font preuve d’une réelle envie de partager leur expertise. Au CFB, nous misons sur des rencontres et des potentiels. Et jusqu’à présent, nous ne pouvons que nous féliciter des résultats. »
Pour conclure, Enzo a un message pour vous : « Si des candidats viennent avec le sourire et le dynamisme, oubliez leur âge et offrez-leur une chance de s’épanouir dans un travail. »

Les dispositifs mis en œuvre au sein du Centre de formation de Bourgogne Franche-Comté pour recruter des seniors

  • Le DAQ 2.0 :
    Le dispositif amont de la qualification version 2.0 est un parcours de formation personnalisé. Il propose l’accès à un premier niveau de qualification.
  • L’IAE :
    L’insertion par l’activité économique est un dispositif soutenu par l’État, qui représente un tremplin vers l’emploi. Il allie des phases de travail et un accompagnement individualisé.
  • Le contrat PEC :
    Le parcours emploi compétences est centré sur l’emploi, la formation et l’accompagnement.