Le jeudi 29 juin, la veille de son ouverture, la Grande École a accueilli la première édition havraise du restaurant éphémère. Après avoir été testé et validé à Rouen ou encore à Pau, le concept a séduit l’équipe de l’agence Pôle emploi du Havre Ferrer particulièrement engagée dans lutter contre le chômage de longue durée des habitants des quartiers prioritaires de la ville.
L’agence Pôle emploi Ferrer fait partie des 66 agences françaises labellisées Equip’Emploi. Ce dispositif mis en place depuis 2021 a vocation d’accompagner les personnes les plus éloignées de l’emploi et résidant en quartiers politique de la ville (QPV). « 49% de nos demandeurs d’emploi habitent les QPV. Ainsi nos 22 conseillers Equip’Emploi suivent chacun 80 personnes pour être en mesure de les accompagner au mieux. Et toutes les actions innovantes qui permettent de les valoriser nous intéressent, explique Stéphanie Jacqueline, responsable d'équipe de l’agence. C’est comme cela qu’est né le premier restaurant éphémère au Havre. Pour mobiliser les demandeurs de façon différente sur un secteur qui a besoin de personnel. »
6 semaines de préparation avant le jour J
« C’est tout le but de ce concept : personne n’attend des professionnels, mais simplement des gens qui font de leur mieux, suivent les consignes et démontrent leur envie de travailler dans ce domaine »
Stéphanie Jacqueline, Responsable d’équipe de l’agence Pôle emploi du Havre Ferrer.
Fin juin, 12 demandeurs d’emploi de longue durée ont donc revêtu leurs tabliers pour constituer une brigade éphémère dans la cuisine et la salle Marrakech de l’établissement La Grande École. Mais pour que cette opération d’immersion d’un jour dans la peau de serveurs et commis fonctionne, il a fallu la préparer très en amont.
D’abord, l’équipe du Havre Ferrer a organisé une porte ouverte sur la restauration plusieurs mois avant. Une occasion de faire venir restaurateurs, organismes de formation spécialisés et demandeurs d’emploi mais aussi de présenter le concept de restaurant éphémère. « Nous avons rencontré la grande majorité des candidats partants pour cette aventure ce jour-là. C’était important de présenter le concept car il n’est pas évident de se projeter en train de cuisiner et de servir des convives pour approcher de potentiels recruteurs », raconte Stéphanie Jacqueline.
La préparation de 6 semaines prévue par l’équipe de Pôle emploi a rassuré. Et pendant cette période, les demandeurs d’emploi ont ainsi tous bénéficié de la prestation « Valoriser son image pro » pour travailler sur leurs savoir-être professionnels. Ils ont aussi tous fait une immersion de 2 jours dans différents restaurants de la ville. Grâce à un partenariat avec la Fondation Total, ils ont aussi reçu l’aide et les conseils de 4 salariés bénévoles de Total pour les préparer aux entretiens. Tous ont été coachés par deux conseillères de l’agence et ont pu découvrir les locaux de la Grande École en amont.
« Cette préparation de 6 semaines est assez intensive pour les demandeurs d’emploi. Cela les met en confiance et nous permet aussi de tester un peu la fiabilité de leur engagement dans l’aventure. Et tout s’est vraiment bien déroulé », précise Stéphanie Jacqueline.
7 contrats signés, 3 entrées en formation
« Nous avons aussi été conquis par le modèle de recrutement, c’est-à-dire l’inversion des rôles qu’il permet. »
Ludivine Bulan, manager du parcours client & apprenant de la Grande Ecole
C’est donc dans les locaux réinventés de l’ancienne école Jean Macé, où se mêlent aujourd’hui restauration, ateliers de loisirs créatifs, cours de cuisine, et autres animations, que les 12 candidats ont élaboré et servi 22 menus pour des convives pas comme les autres.
Six étaient en salle pour préparer les tables et assurer le service, et six étaient en cuisine aux côtés du chef. C’est lui qui a réparti les rôles pour la préparation des entrées, plats et desserts et la plonge. « Tout le monde est arrivé un peu avant 9h. Nous avons fait un court brief collectif pour rassurer les participants, leur dire que c’était leur journée, leur rappeler qu’ils n’avaient pas besoin d’être parfaits. Car c’est tout le but de ce concept : personne n’attend des professionnels, mais simplement des gens qui font de leur mieux, suivent les consignes et démontrent leur envie de travailler dans ce domaine », détaille encore Stéphanie Jacqueline. Ensuite chacun est parti à sa tâche avant l’arrivée des invités vers 12h30.
8 restaurateurs représentant 11 établissements se sont déplacés. À chaque table, un manager ou un conseiller entreprise Pôle emploi était aussi présent pour parler des actions d’adaptation possibles pour recruter les candidats ayant peu ou pas d’expérience en restauration. Entre chaque plat, ils ont conduit les professionnels en cuisine par petit groupe pour qu’ils puissent avoir un aperçu de la façon dont les demandeurs d’emploi travaillaient en cuisine.
« Non seulement, les valeurs d’inclusion portées par le projet avec l’objectif d’agir en faveur de la réinsertion des demandeurs d’emploi correspondent à notre vision, témoigne Ludivine Bulan, manager du parcours client & apprenant de la Grande Ecole. Mais nous avons aussi été conquis par le modèle de recrutement, c’est-à-dire l’inversion des rôles qu’il permet. Les restaurateurs devenaient à leur tour « clients », les demandeurs d’emploi devenaient « employés » pour le temps d’un service. Cela a permis aux employeurs de découvrir de manière concrète leurs savoir-être au-delà de leurs savoir-faire : leur qualités d’agilité, leur faculté d’adaptation ainsi que leur gestion des émotions ».
Une fois le repas pris, est venu le temps du job dating au cours duquel les candidats ont pu rencontrer les restaurateurs. Plusieurs demandes d’immersions s’en sont suivies, et dans les deux mois qui ont suivi le restaurant éphémère, 7 participants étaient en emploi dont 5 en CDI et 3 étaient entrés en formation. Seuls 2 des participants à cette première édition n’ont pas donné suite car ne souhaitant finalement pas travailler dans le domaine.
Le lieu d’accueil du restaurant éphémère, La Grande École, a fait partie des recruteurs. « Ils ont embauché en CDI deux personnes particulièrement éloignées de l’emploi. Michel, 51 ans, et Pharat, une personne ne maîtrisant pas encore bien la langue française, se réjouit la responsable d’équipe de l’agence Pôle emploi du Havre Ferrer. L’expérience a donc été une réussite et c’est pourquoi nous sommes en train d’organiser une deuxième édition. Elle se déroulera le 11 décembre dans l’enceinte du restaurant italien Al Dente. »