« C’est un “vis ma vie” d’employé de commerce. Une demi-journée durant laquelle employeurs comme demandeurs d’emploi sont acteurs du recrutement. Les candidats prennent l’habit et les fonctions d’un salarié du magasin où se déroule l’opération, et les recruteurs jouent les clients mystères », explique Sonia Prou, directrice de l’agence France Travail d’Avranches.
Et cette méthode de recrutement à rebours du classique envoi de CV suivi d’un entretien plaît. L’agence n’en est pas à sa première édition. La première opération de commerce éphémère, organisée en octobre 2023 au sein de l’enseigne Mr Bricolage, a en effet séduit d’autres commerçants et conduit à l’organisation d’une deuxième édition le 30 janvier dernier. « Quand on recrute on reçoit beaucoup de CV et une fois en entretien, il n’est pas toujours évident de déterminer les aptitudes d’une personne, ses compétences relationnelles et d’organisation », raconte Justine Culeron, adjointe du magasin Intersport d’Avranches. « Alors lorsqu’on a eu les échos du premier commerce éphémère et quand notre référente chez France Travail nous a expliqué en détail l’opération et ses objectifs, on s’est dit pourquoi pas ? ».
Trois semaines de préparation
« Dès le départ, on prépare l’opération avec les employeurs. Et c’est très important car cela leur permet de s’impliquer du début à la fin. »
Sonia Prou, Directrice de l’agence France Travail d’Avranches.
Pour organiser cette deuxième édition, les commerçants intéressés pour jouer les « recruteurs mystères » comme les candidats motivés pour se glisser dans la peau d’employés de commerce n’ont pas manqué. Outre Intersport qui a ouvert ses portes pour l’occasion, des responsables d’Aldi, de Carrefour Market, de Super U et des petits commerces Aux délices du Terroir et Boulangerie Louise se sont ainsi déplacés le 30 janvier. « Dès le départ, on prépare l’opération avec les employeurs. Et c’est très important car cela leur permet de s’impliquer du début à la fin », souligne Sonia Prou.
Un délai de trois semaines en amont de l’action est nécessaire à l’organisation. Plus de 20 personnes se sont ainsi déplacées pour la réunion d’information organisée par l’agence France Travail d’Avranches en partenariat avec le Conseil départemental de la Manche, la Mission locale, Cap emploi, Intersport. Puis les candidats intéressés sont préparés. Pour ceux n’ayant jamais travaillé dans le commerce, France Travail et ses partenaires ont organisé des journées d’immersion afin de les sécuriser pour le jour J. Et tous, 14 au total, ont été préparés lors d’ateliers. « Nous avons notamment organisé un atelier d’une demi-journée avec notre psychologue du travail autour de l’estime de soi, de l’attitude et de la présentation à avoir », précise Sonia Prou.
Tutorat et mise en situation
« C’est vraiment une opportunité de voir un potentiel employé en situation et d’observer ses savoir-être en direct. À refaire ! »
Justine Culeron, Adjointe du magasin Intersport d’Avranches.
Et le 30 janvier est arrivé. « On était surpris d’avoir autant de candidats », confie Justine Culeron. À 8h45, les 14 demandeurs d’emploi étaient prêts à se lancer. Intersport les a équipés de chasubles du magasin et de badges avec leurs prénoms, puis leur a tous dédié un tuteur pour qu’ils puissent participer aux tâches de déballage des stocks et de mise en rayon.
A 9h45, les recruteurs ont commencé leur « quête » de candidats. En bons clients, ils posent des questions, mais elles ne sont pas totalement désintéressées. En effet, France Travail a préparé en amont avec eux une fiche permettant d’évaluer les compétences et habiletés des salariés d’un jour. « Cela s’est fait simplement et naturellement dans le magasin sans chambouler l’organisation de la journée. Les candidats ont aussi pu répondre aux demandes de clients lambda », poursuit Justine Culeron. « Cela nous a plu de voir qu’ils se sont tout de suite mis dans la peau d’un vendeur. Nous avons cherché à tester leur aisance relationnelle, la manière dont ils s’adressaient aux clients. Ils ne peuvent pas tout connaître dès le départ mais le premier essentiel, c’est d’aller vers le client. »
Résultat, au 1er mars, une période de formation préalable à l’embauche était en cours aux Délices du Terroir, un CDD au sein de la boulangerie Louise, un autre chez Aldi, et deux formations étaient lancées. « L’objectif n’est pas forcément un retour immédiat à l’emploi. Il s’agit d’abord de dynamiser et de susciter des carrières. Et pour les équipes de France Travail, c’est une chance de toujours mieux connaître les candidats pour mieux en faire la promotion auprès des entreprises », estime Sonia Prou.
« Pour nous, c’était une expérience très positive» conclut Justine Culeron. On a pu échanger avec d’autres enseignes et se rendre compte qu’on pouvait développer une logique de solidarité dans le recrutement. Et c’est vraiment une opportunité de voir un potentiel employé en situation et d’observer ses savoir-être en direct. À refaire ! »